Young June Kim fabrique en photographie, de la masse volumique, presque palpable. À l'affût d'une expérience tactile du monde, il traque le potentiel sculptural des objets et des gestes les plus banals, qu'il isole dans des images noir et blanc, au cadrage serré : décontextualisés, autonomisés et sublimés, ils deviennent la pure expression de leur enveloppe formelle.
Assimilant le réel à une vaste salle d'opération, le photographe coréen se penche sur son sujet selon un protocole rigoureux, et réalise ses prises de vue à la chambre moyen format. Il associe inlassablement ses images, sans titre ni date ni hiérarchie, avec l'ambition de mettre « tous les regards du monde au même niveau et à qualité égale ». Les corps photographiés laissent apparaître quelque chose d'inopiné, une forme échappant au contrôle qui n'est pas sans susciter la curiosité, si ce n'est le trouble, tandis que les objets semblent dotés d'une forme de vie propre, interne. Jouant des polarités entre vie et mort, animé et inanimé, le travail de Young June Kim se révèle fortement imprégné d'une sensibilité asiatique du monde, selon laquelle la nature et le corps humain forment des microcosmes dont chaque composante renvoie à une partie de l'univers.
Diane Dufour,
Directrice du BAL à Paris